samedi 20 décembre 2008

L’Amérique par le petit bout de la lorgnette


A 43 ans, Antoine de Maximy a dormi à peu près partout. En Somalie, en Thaïlande, au Niger. Dans des cases, sur la plage, à l’arrière de pousse-pousse. On pensait avoir tout vu, tout entendu de lui. On n’avait pas complètement tort.
Pour son nouveau numéro de clown itinérant, l’homme-caméra s’est fixé pour objectif de traverser les Etats Unis d’Est en Ouest. Rien de très original jusque là, sauf qu’il n’a, comme à son habitude, ni voiture, ni vélo, ni envie de dormir à l’hôtel. Il a même décidé de squatter en fin de périple le lit à eau king size d’une star hollywoodienne. Alors, y arrivera, y arrivera pas ?
Pour connaître la réponse, il vous faudra d’abord survivre aux deux mois que dure le voyage fictif avec de Maximy. Tantôt juché sur son épaule, tantôt au bout de son bras, l’œil du spectateur est baladé sans relâche. Il doit en plus supporter le sourire crispé et le polo rouge vif du héros. Epileptiques, s’abstenir.

Scènes de vie

A chaque ville traversée correspondent une ou plusieurs rencontres. Et à chaque rencontre, une anecdote. Il ne faudrait pas que le public s’ennuie. A New-York, ce sera donc un acrobate nonagénaire. En Louisiane, un rescapé de l’ouragan Katrina. En Arizona, une Indienne navajo un peu paumée… Bref, tout ce beau monde compose un kaléidoscope déroutant et passionnant d’une Amérique souvent en proie au doute.
Mais c’est là que le bat blesse. L’Amérique que l’on découvre en même temps que Maximy est admirable, pleine de contradictions et de charme, mais elle est tout l’opposé du réalisateur. Lui est arrogant, faussement décalé, rarement sincère. A croire qu’il amplifie ses défauts pour mieux mettre en valeur les Hommes qu’il filme.
Comme un reportage photo qui serait inutilement sonorisé, les commentaires de Maximy viennent ternir la beauté des personnages. Nain gesticulant parmi ces géants du Nouveau Monde, il fait de l’ombre à ces portraits et ces ambiances débordant d’humanité. Baroudeur volubile à l’accent français irréprochable, il s’avère incapable de communiquer avec ses hôtes. Les silences sont subis, gênants. Et quand les mots ne déçoivent pas, ils agacent.

Ego-trip

Le tout ne manque cependant pas d’humour ni d’imagination. La bande originale, savamment mijotée par Béatrice Ardisson, est pétillante et naïve, à l’image du film. La chute est même assez savoureuse. Et certaines scènes sont tellement cocasses qu’elles paraissent directement tirées d’un film. Hollywood n’est jamais bien loin.
On regrette au fond que le réalisateur ne fasse pas de choix clair entre sa folle irrévérence et son désir subliminal de mener une sorte d’expédition ethnologique des temps modernes. Sa réflexion diffuse sur l’hospitalité et la liberté n’est pas sans intérêt ; seulement, elle manque de crédibilité.
Antoine de Maximy, c’est un peu le Christine Angot du documentaire. Convaincu que son histoire en vaut mille autres, il fonde toute son entreprise sur cette inversion des rôles qui fait que l’auteur devient acteur de son propre film. L’audace cède alors la place à l’arrogance, et la curiosité, au narcissisme.

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